Les illusions perdues de la prestidigitation populaire et financière Par le Prof Mary Teuw Niane

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Vouloir être ce qu’on n’est pas
Vouloir être ce qu’on n’est pas

Les foules et l’argent, telles furent, pendant des décennies, les leurres pour attrape-nigaud, que les dirigeants politiques de notre pays tendaient aux populations pour les soumettre à leur volonté électorale.

Nous nous souvenons des millions de participants annoncés par le Président Abdoulaye Wade durant son meeting de la VDN avant sa défaite de 2012.

Les journalistes eurent d’ailleurs beaucoup de mal, à l’époque, à loger le nombre de participants dans un mètre carré de ce grand boulevard tellement le chiffre était surréaliste bien que la foule impressionnante.

C’est une évidence, les foules, surtout mobilisées à coup de billets rouges, de tee-shirts et de tissus, ne présagent d’aucun résultat électoral favorable lors des élections.

Et l’argent ?

Les billets rouges ont un effet immédiat.

Ils déplacent les foules de populations sans emploi, sans revenu, à l’affût de la moindre opportunité pour arrondir la fin de journée.

Le tèertu, l’accueil politique, est devenu une activité rémunérée prisée par les jeunes et les femmes.

Voilà une journée inespérée de travail en attendant des jours meilleurs, disent-ils.

L’innovation du Président de la République est l’annonce à chaque visite, à chaque endroit, de financements mirobolants pour des projets publics.

Le cumul de ces promesses financières aboutit à des montants faramineux qui devraient transformer Kaolack en Paris et le Sénégal en Corée du Sud.

La ville de Kaolack continue à patauger dans le marasme économique, le désœuvrement généralisé et le désespoir qui conduit, à l’image de tout le pays, les jeunes à prendre les pirogues de la mort ou le chemin désespéré de l’Amérique.

Le Sénégal caracole en tête des pays d’Afrique où le coût de la vie est l’un des plus chers, où la nourriture est inabordable, l’eau et l’électricité sont non seulement chères mais leurs factures ont des montants aléatoires, où les malades ont peur d’aller se soigner à cause de soins, analyses, médicaments et autres prestations inabordables, etc.

Ces annonces du Président n’ont pas toujours des suites.

Le pays est parsemé de chantiers inachevés comme le lycée professionnel de Sandiara dont les murs nus accusateurs se dressent sur la route de Kaolack.

Les orages de milliards de notre Président ressemblent à nos tornades de « sattumbar », de septembre, qui sont accompagnées de terrifiants coup de tonnerres, de vents dévastateurs et malheureusement de très peu de pluie utile.

N’est pas Kankan Moussa qui veut !

Le drame du manageur de BBY est qu’il est d’un autre temps, complètement dépassé par le Sénégal qu’il a contribué à créer.

Le Sénégal a fait son deuil des tambours, des flonflons et des paillettes artificielles.

Les Sénégalaises et les Sénégalais sont devenus des spectateurs avisés d’une pièce de théâtre qu’ils n’attendront pas la fin, pour se substituer aux acteurs pour l’achever à travers le scénario qui leur convient.

Le Président Leopold Sédar Senghor avait fait des adieux sobres.

Il ne porta pas ombrage à son successeur pourtant désigné.

Notre Président annonce partir, quitter le pouvoir, tout en faisant comprendre à tous les Sénégalais que tout ce qui se fera après lui, ce sera en réalité toujours ses projets à lui.

Il a désigné son candidat, son clone, son double. Car celui-ci n’aura comme tâche que d’exécuter le programme qu’il a publiquement déjà tracé.

Il tente avec toute l’énergie qui lui reste, de museler, d’estropier les autres candidats qui pourraient gâcher son plan successoral de gouvernance par procuration.

Le pouvoir rend fou, aveugle et sourd.

Le pouvoir dresse une tour d’ivoire entre son détenteur et le peuple.

Les hommes et les femmes de pouvoir perdent leur lucidité.

Ils font comme ils avaient l’habitude de faire alors que le peuple silencieux, en apparence docile, prépare sa revanche électorale implacable face aux bourreaux de ses espoirs.

Le Président continue son tour d’adieu-au revoir, ses bains de foules, ses pluies de milliards imaginaires et ses projets d’un futur impossible.

Les Sénégalais attendent calmement un processus électoral transparent, inclusif et une justice juste.

Bientôt, très bientôt, le rideau va tomber pour qu’arrive le Sénégal nouveau de vérité, de justice et de paix.

Dakar, jeudi 16 novembre 2023
Prof Mary Teuw Niane

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